Prédication donnée le dimanche 25 août
« Un des spécialistes de la Loi s’approcha de lui ; il avait entendu cette discussion et avait remarqué avec quel à-propos Jésus avait répondu. Il lui demanda :
– Quel est le commandement le plus important de tous ?
Jésus répondit :
– Voici le commandement le plus important : Écoute, Israël, le Seigneur est notre Dieu, il est le seul Dieu ; tu aimeras donc le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée et de toute ton énergie. Et voici celui qui vient en second rang : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus important que ceux-là.
– C’est bien, Maître, lui dit le spécialiste de la Loi, tu as dit vrai : il n’y a qu’un seul Dieu, il n’y en a pas d’autre que lui ; l’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence et de toute son énergie, ainsi qu’aimer son prochain comme soi-même, c’est bien plus important que tous les holocaustes et tous les sacrifices.
Jésus, voyant qu’il avait répondu avec intelligence, lui dit :
– Tu n’es pas loin du royaume de Dieu.
Après cela, personne n’osa plus lui poser de question. »
Marc 12 versets 28-34
Au moment où débute cette histoire, Jésus sort d’une longue confrontation avec les chefs des prêtres, les spécialistes de la loi et les anciens du peuple. Ils s’étaient rassemblés autour de lui dans l’idée de le piéger. Ils espéraient lui faire dire quelque chose de contraire à leurs traditions, pour pouvoir l’accuser et le faire condamner. Ils cherchaient en fait un moyen de se débarrasser de lui. Mais devant la sagesse dont fait preuve Jésus dans ses réponses, ils ont finalement cédé et se sont retirés. Tous sauf un. Et c’est là que commence notre histoire de ce matin.
En effet, l’un d’entre ces pharisiens s’était tenu un peu à l’écart, en observateur. Il ne s’était apparemment pas joint au concert des propos hypocrites de ses collègues. Il voulait en fait se faire sa propre idée sur qui est Jésus, et sur quoi exactement repose son ministère. A ce stade il n’avait aucune idée préconçue à son sujet, ni en bien ni en mal. A ses yeux il existait cependant un critère bien précis permettant de juger de la valeur de Jésus : s’il est un homme de Dieu, il doit avoir un certain positionnement par rapport aux Écritures. Aussi ce pharisien va poser à Jésus une question, qui n’est pas un piège, et qui montre qu’il cherche véritablement à se convaincre de la légitimité de ce que Jésus fait et enseigne.
- Quel est le commandement le plus important de tous ? Lui demande-t-il.
Et Jésus ne se dérobe pas. Il répond à la question en citant les Écritures. C’est ce qu’il fait toujours lorsqu’il s’agit de défendre la vérité ou de repousser un ennemi, comme lors de sa confrontation avec Satan au désert, tout au début de son ministère. Jésus avait alors simplement cité des passages de la Bible en réponse aux questions de Satan, et Satan avait dû se retirer. La parole de Dieu comme arme contre Satan ! Par cet épisode nous voyons qu’il y a quelque chose de plus que de simples mots dans la Parole de Dieu. Quelque chose qui relève de la puissance de Dieu lui-même. Et Jésus le sait. C’est pourquoi Ii a bâti toute sa vie, et fondé tout son ministère, sur la soumission à la parole de Dieu.
Pour notre spécialiste de la loi il importait finalement assez peu de savoir d’où venait Jésus et quelle avait été sa formation. Une seule chose comptait à ses yeux : quel rapport Jésus entretient-il avec les Écritures ? A ses yeux cela seul pouvait légitimer, ou non, tout ce que Jésus était et faisait. Aussi, ayant vu que Jésus avait bien répondu à la question, il va dorénavant s’adresser à lui en l’appelant « maître ». Cet enseignant de la loi s’est distingué de ses collègues prêtres qui cherchaient uniquement la faille chez Jésus. Lui ne se permettait pas de le juger avant de savoir comment Jésus se positionnait par rapport à la parole de Dieu, tandis que les autres l’avaient confronté à leurs traditions humaines. Il a ainsi montré une profonde compréhension de l’enseignement des Écritures, en remettant Dieu et sa Parole au centre de l’attention.
Tout comme pour Jésus, nous voyons donc que c’est notre rapport à Dieu et à sa Parole qui nous définit. Non pas aux yeux des hommes bien sûr, parce que nos critères de jugement et de valeur sont généralement plus prosaïques, mais à ceux de Dieu. Et pourquoi notre rapport aux Écritures est-il si important ? Tout simplement parce que Dieu a voulu notre existence, à chacun de nous individuellement. Parce qu’avant même de naître nous existions dans la pensée, dans l’intention et dans le cœur de Dieu. C’est cela qui nous donne à toutes et à tous notre légitimité. Qui que nous soyons, quelle que soit notre histoire et le parcours de notre vie, l’amour que Dieu nous porte depuis l’origine du monde nous donne à tous la même valeur.
Un prédicateur se tient un dimanche matin devant son assemblée. Il sort de sa poche un billet de 200 € tout neuf et le tient en l’air. « Si quelqu’un veut de ce billet de banque, levez la main et je vous le donnerai à l’instant même ! ». Immédiatement toute l’assemblée lève la main comme un seul homme. Le prédicateur prend alors ce billet et le chiffonne entre ses doigt jusqu’à en faire une boule de papier. Il le tend à nouveau en posant la même question. Toutes les mains se lèvent encore. A la consternation générale il jette alors ce billet au sol, marche dessus et le piétine avec force jusqu’à l’aplatir. Puis il ramasse ce bout de papier sale et écorné et le tend à nouveau devant l’assemblée, avec la même question. Et toutes les mains se lèvent à nouveau !
Pourquoi ? Parce que quelle que soit l’état de ce billet, ce qui lui est arrivé, l’état dans lequel il se trouve, il vaut toujours 200 € et toutes les banques vous l’échangeraient contre un billet neuf.
De la même manière, quelle que soit notre histoire, ce qui nous est arrivé, ce que nous avons accompli ; quelles que soient nos grandeurs, nos misères ou nos parts d’ombres, nous avons toujours de la valeur aux yeux de Dieu, parce qu’il nous aime !
Aimer Dieu
Je voudrais examiner rapidement avec vous le verset cité par Jésus et qui semble si important à ses yeux et à ceux du pharisien qui l’a interrogé : « le Seigneur est notre Dieu, il est le seul Dieu ; tu aimeras donc le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée et de toute ton énergie».
Avez-vous remarqué à quel point l’attende de Dieu est contraignante dans ce qui nous est dit là ? Il nous demande de l’aimer ! Si je vous avais demandé : « à votre avis, quelle est l’exigence de Dieu à notre égard ? » auriez-vous répondu « je dois l’aimer ? ». Nous percevons bien souvent la volonté de Dieu en termes d’obligations et d’interdits, et nous fuyons. Mais Dieu exprime sa volonté en termes de relation. Pas n’importe quel type de relation, celle basée sur l’amour. Laissons-nous pénétrer un instant par cette idée et par ce qu’elle implique.
L’amour dont il s’agit ici n’est pas celui qui peut unir deux êtres dans une passion commune. Ce n’est pas un élan sentimental, c’est quelque chose qui va au-delà de ce que nous pouvons expérimenter avec nos semblables. L’amour dont il il est question ici et qui nous lie au Père nous est-il dit, vient du cœur, de l’âme, de nos pensées et de toutes nos forces. Un tel amour englobe en fait tout notre être dans toutes ses facettes, jusqu’aux racines de ce que nous sommes.
Le cœur d’abord : il ne s’agit pas ici de l’organe qui nous maintient en vie. Le cœur représente dans la Bible le siège de notre personnalité. Ce que nous sommes et qui fait de nous des êtres uniques. C’est avec notre singularité, notre manière d’être, que nous sommes appelés à aimer Dieu.
L’âme : est le siège de la volonté, de l’intelligence et des émotions. Tout ce qui se met en action lorsque nous interagissons avec les personnes et les circonstances qui nous entourent. Aimer Dieu est donc un acte décidé, voulu, qui implique notre capacité à réfléchir sur cet amour, à en ressentir parfois la chaleur.
La pensée : je ne sais pas si vous l’avez constaté, il me semble que la pensée est l’une des choses les plus vagabondes. Elle papillonne si facilement d’un sujet à un autre et met à rude épreuve la capacité de concentration de nos jeunes devant un professeur. Elle est aussi notre jardin secret, le lieu de notre intimité. Elle est de ce fait un symbole de liberté absolue. C’est avec cette liberté et cette intimité que nous sommes appelés à aller à la rencontre de l’amour du Père.
Nos forces enfin : elles sont le siège de notre énergie vitale, ce qui nous permet de concrétiser de mille manières tous les éléments que nous venons de citer, au travers d’une action voulue, réfléchie, désirée.
Oui, Dieu nous a aimés le premier, alors que rien qui l’y obligeait. Il nous a aimés malgré toute la noirceur qui habite les cœurs des hommes et des femmes et les tient éloignés de Dieu. Il nous a aimés malgré notre incapacité à le connaître ou même à nous intéresser à lui. Oui, Dieu a fait le chemin vers nous en traversant tout ce qui nous séparait de lui. Il l’a fait au travers de la vie, de l’enseignement et de la mort de son Fils Jésus. Depuis lors il se tient tout près de chacun d’entre nous, dans l’attente de notre réponse à son offre de relation.
Aujourd’hui, ce matin, Dieu nous propose une relation où sa présence traversera et vivifiera toutes les sphères de notre personne : le cœur, l’âme, la pensée et notre énergie. Par sa présence, si nous daignons l’accepter et la recevoir en nous, il donnera un sens nouveau à ce que nous sommes et à ce que nous entreprenons. Il éclairera notre perception, notre intelligence, notre compréhension, notre analyse des choses et des gens. Il sera là pour inspirer nos décisions. Il touchera notre âme pour redonner un équilibre à nos émotions et leur permettre de trouver leur véritable place, sous la coupe de notre intelligence, non le contraire. Par sa présence il nous inspirera des projets au moyen desquels nous contribueront activement à tout ce qui édifie, inspire, revitalise et redonne espoir.
La relation que Dieu nous offre est à l’image de ce qu’il a fait pour nous. Il nous a tout donné nous dit la Bible. Il vient aujourd’hui nous offrir de réorienter tout notre être pour qu’il se replace dans l’axe de son amour et de sa volonté, comme on oriente avec précision une parabole pour qu’elle capte et diffuse les bonnes chaînes. Si nous répondons à cet amour de Dieu, nous pouvons être assurés que son amour déposé en nous nous poussera à l’aimer avec tout ce que nous sommes, comme on s’investit à fond dans ce qui anime notre passion. Aimer Dieu n’est pas une exigence de plus, c’est une promesse que Dieu nous fait, car il va lui-même remplir notre être de sa capacité à aimer.
Aimer l’autre
L’amour de Dieu dans le cœur de quelqu’un a un curieux effet. Il s’exprime tout autant envers Dieu qu’envers les autres. La Bible dit que nous avons à aimer notre prochain, celui qui croise notre route. Dieu attend cela de nous, non pas comme une obligation qui s’imposerait à nous sous la forme d’une exigence, mais plutôt comme on une conséquence de notre relation avec Lui. La Bible appelle cela des fruits. Car le cultivateur qui cultive un champ et lui prodigue ses soins, attend comme une évidence que les graines semées dans la terre produisent une récolte. C’est naturel et presque automatique.
Cet amour du prochain est d’une telle importance que Jésus dit du verset « tu aimeras ton prochain comme toi-même » qu’il est semblable à celui qui invite à aimer Dieu lui-même. Prenez l’image d’un lac de montagne dans lequel se déverse un grand torrent, celui de l’amour de Dieu. A un moment donné le lac sera rempli et il commencera à déborder pour donner naissance à son tour à un fleuve, qui ira irriguer d’autres terres. Nous sommes destinés par Dieu à recevoir son amour, c’est le destin de l’homme dès sa création. Par pour nous en gaver et en profiter égoïstement, mais pour que l’amour qui nous remplit se déverse ensuite sur d’autres, tous les autres, ceux que la Bible nomme « le prochain ».
Oui l’amour de Dieu nous conduit à l’amour du prochain. Un amour qui s’exprime par le don de soi. Un amour qui nous permet de passer par-dessus les obstacles qui nous séparent des autres, de nos proches parfois, pour reconstruire des ponts vers l’autre, tout comme Dieu l’a fait pour nous. L’amour est ce que nous devons à tous les hommes, et cet amour découle de celui que nous portons à Dieu.
Mais alors la question se pose. Comment pourrions-nous aimer Dieu si nous ne le connaissons pas ? Et comment le connaître, si nous ne nous abreuvons pas régulièrement à sa Parole ? Car Dieu ne nous attend pas dans un lieu particulier le dimanche matin. Pas uniquement. D’abord il nous donne rendez-vous dans sa Parole, révélée et transmise à travers l’histoire pour être accessible à chacun comme une nourriture. Martin Luther n’a cessé d’insister sur l’importance de se nourrir de la Bible, chaque jour. C’est pourquoi il a milité pour l’alphabétisation de tous, afin de donner à chacun accès aux Écritures. C’est là, seuls devant notre Bible, que nous sommes appelés à rencontrer notre Dieu de façon personnelle et intime, c’est là que débute la relation d’amour dont nous parlons ce matin.
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Prédication donnée au culte du 25 août 2019 – Patrice Willm